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Vous ne franchirez
pas indemne
La Porte du non-retour
Daniel Vuataz,
rédacteur à St-Gervais
2010, province du Nord-Kivu. Le lieu d'un conflit qui dure depuis le début des années 1990, le plus meurtrier de la planète depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Parmi les représentants des médias qui gravitent autour des « camps de déplacés internes », il y a Philippe Ducros. Le Québécois n'est pas journaliste. Il ne travaille pour aucune chaîne de télévision. Son métier : dramaturge, comédien, metteur en scène (au sein de la compagnie Hôtel-Motel). Sa méthode : l'écriture de spectacles intimes, engagés, qui puisent directement leur matière dans des expériences, des rencontres et des chocs vécus parmi les zones les plus précaires du globe.
La Porte du non-retour, visible depuis le 30 janvier à Saint-Gervais (et présenté en juillet passé à Avignon), est une installation hybride. Il s'agit au premier abord d'une exposition, puisque les 49 photos tirées du voyage au Nord-Kivu (et d'autres périples au Bénin, au Togo, au Ghana et en Ethiopie) sont accrochées aux murs. Mais il faut y voir une réelle expérience théâtrale : nous sommes invités à déambuler dans l'exposition équipés d'un audioguide. Dans nos oreilles, la narration de Philippe Ducros. En guise de décor, les photos réparties en 20 « scènes ». L'histoire, c'est celle d'un homme qui, bloqué dans les embouteillages de Kinshasa, tente de digérer l'horreur des choses vues et entendues au long de son périple.
Il y a une différence fondamentale entre l'image télévisuelle, diffusée dans le journal du soir, et un cliché de Philippe Ducros. La première n'apparaît que quelques secondes au milieu d'un flux d'informations hétéroclites. Le second, au mur de l'installation-exposition, vous fixe durablement et vous parle, littéralement. Une expérience artistique puissante. L'art au service de l'indicible.
La Porte du non-retour Déambulatoire théâtral et photographique de Philippe Ducros (Cie Hôtel-Motel)
du 30 janvier au 9 mars (entrée libre)
Plus d'infos
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Trois projections et
trois conférences pour
ouvrir Mémoires blessées
Chaque année depuis 2009, Mémoires blessées met en lumière le destin tragique de populations ou d'individus que l'Histoire a écartés de ses registres officiels. La sixième édition propose trois spectacles et une exposition, échelonnés entre le 30 janvier et le 9 mars (voir la rubrique « Fait maison » de la dernière édition de cette Lettre).
Pour inaugurer le cycle 2014, Saint-Gervais vous convie à trois soirées exceptionnelles.
La première (mercredi 29 janvier) sera consacrée au sujet sensible – actuel, local et international – de la frontière : deux conférences examineront les enjeux historiques (Marc Vuilleumier) et géographiques (Bernard Debarbieux) du cas franco-genevois (17h), alors que la projection du film Mémoires de la frontière (2002) de Bernard Romy et Claude Torracinta (qui sera présent) nous replongera dans le contexte de la Seconde guerre mondiale (20h). Un buffet est prévu entre les conférences et la projection.
La seconde soirée (jeudi 30 janvier, 20h) proposera des discussions autour de deux œuvres qui documentent, chacune à leur manière, la montée de la terreur : le film de Julien Bryan 1937, Un été en Allemagne nazie (1938) et le livre d'Henriette Rémi Hommes sans visages (1942), consacré aux « gueules cassées » de la Grande Guerre.
La dernière soirée (mardi 4 février, 20h) abordera la question de la stigmatisation des Tsiganes, de ses mécanismes et de ses conséquences tragiques au cours du siècle dernier, avec la projection de Mémoires tsiganes, l'autre génocide (d'Idit Bloch et Henriette Asséo, 2011), en présence des réalisatrices.
Trois soirées thématiques pour inaugurer Mémoires blessées : mercredi 29 janvier, jeudi 30 janvier et mardi 4 février.
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Segen Tezare veut
faire de la politique « autrement »
Ce soir à 18h, avant la septième représentation de Trop frais !, le Parlement des Jeunes Genevois (PJG) vous donne rendez-vous pour une séance de « speed debating ». Interview de Segen Tezare, inventrice du concept, membre du PJG depuis deux ans et comédienne dans Trop frais !
La Lettre : C'est quoi le « speed debating » ?
Segen : Un débat public en plus ludique, à mi-chemin entre la discussion d'idées et le « speed dating ». Réparti en six tables (trois « pour », trois « contre »), le public discute, pendant six fois dix minutes, sur un pied d'égalité avec les intervenants, les modérateurs et les autres participants. C'est un lieu de rencontre où on se tutoie et où la politique est désacralisée.
Pourquoi tu t'engages en politique ?
Parce que je refuse de subir. Je me considère chanceuse de vivre dans un pays où l'on me laisse autant le choix. Les Parlements des Jeunes sont des associations apolitiques qui veulent faire de la politique autrement.
Quelles sont les causes qui te tiennent à cœur ?
La discrimination, l'ignorance qui entraîne la peur et la haine… Et j'aime susciter l'engagement chez les autres jeunes.
Il y a des points communs entre le théâtre et la politique ?
L'expérience de Trop frais ! m'aura appris que nous sommes tous liés, sur scène, par un « contrat ». Si le contrat est rompu, le spectacle est dénué de sens. Pour moi, ce « contrat » est aux comédiens ce que la politique est à la société.
Mercredi 22 janvier à 18h, séance de « speed debating » à Saint-Gervais, ou L'art de confronter ses opinions.
Par le Parlement des Jeunes Genevois (PJG).
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