Ç a circule à Saint-Gervais ! La caravane fleurie des rêveurs-révolutionnaires de Dorothée Thébert et Filippo Filliger poursuit sa route en direction du Tessin et de l'Italie alors que le mobile home américain de Western Dramedies fonce pleins tubes sur Genève… Dans l'intervalle, c'est Latifa Djerbi qui occupe seule la scène. Trois bonnes raisons de courir voir son solo dès mardi prochain.

1. Parce que la trajectoire hors norme de Latifa Djerbi, de la Tunisie à la Suisse, est à la fois unique et emblématique de l'Europe actuelle.
2. Parce que les mathématiques et le théâtre n'ont jamais fait aussi bon ménage et qu'on ne s'est jamais autant marré en parlant de probabilités.
3. Parce que, vous l'ignorez peut-être encore, mais l'intime est l'une des choses les plus subversives qui soit.

par Daniel Vuataz

Genève affirme haut et fort son identité. Celle d'une ville multiculturelle, plurielle, consciente de sa diversité. Une ville où des artistes de tous les horizons se croisent et se côtoient. Dans quelles conditions ? Saint-Gervais propose tout au long de l'année des éléments de réponses. La maison profite de la semaine de la Diversité 2014 (du 1er au 5 octobre) pour intensifier sa mission. Quatre jours exceptionnels pour prendre le pouls de la cité aux 191 nationalités. Ne manquez surtout pas :
– La soirée d'inauguration de la manifestation, le 2 octobre à 18h30, en présence de Sandrine Salerno. Les workshops entre artistes de tous horizons qui se seront tenus à huis clos les 1er et 2 octobre seront restitués en public.
– Le solo de Latifa Djerbi, dans la grande salle du 1er au 3 octobre. En présentant sa trajectoire individuelle, la comédienne-mathématicienne tunisienne parle pour tous ceux qui se sont retrouvés, par hasard ou nécessité, sur les bords du Léman. Et qui y cherchent encore leur place.
– La rencontre exceptionnelle avec l'auteur et éditeur Bernard Comment, le 3 octobre à 20h30. Directeur de collection aux Editions du Seuil mais aussi conseiller de programme pour Arte, le Jurassien est l'auteur d'une dizaine de romans et récits (Prix Goncourt de la nouvelle en 2011) centrés autour des questions d'identité et d'altérité.
Trois événements parmi tant d'autres à découvrir ici !

Après les bons tuyaux de Tiphanie Bovay-Klameth dans La Lettre de la semaine passée, c'est au tour de François Gremaud de nous livrer son digest américain pour l'écriture de Western Dramedies.
Photographie : « Il y a quelque chose des photos que Christian Lutz a réalisées dans l'Ouest américain dans notre spectacle, mais notre principale inspiration "photographique" est le travail de Cindy Sherman, plus pour son "geste" que son esthétique d'ailleurs, sa manière de figurer des personnages "typiques" sans jamais être dans l'imitation ni la vraisemblance. »
Musique : « Nous avons écouté beaucoup de country, principalement Dolly Parton, Loretta Lynn, Tammy Wynette et Willie Nelson. Les chansons que nous avons écrites pour le spectacle sont vraiment empreintes de ces écoutes. »
Scène : « Pour ma part, je suis sensible au moins à trois figures "comiques" ou considérées comme telles. Zouc, avant tout, pour la manière extraordinairement sensible de composer les personnages qu'elle a observés. Jacques Tati, pour la manière qu'il a de mettre nos travers en lumière sans jamais se départir de tendresse et d'humanité (je pourrais aussi ici citer Christoph Marthaler, pour les mêmes raisons). Enfin, Buster Keaton, pour la joie qu'il a toujours mis à composer avec la tragédie de la vie. »

«Moi, Jacques Livchine, metteur en songe, animateur du théâtre de l'Unité en France, je déclare qu'il est du devoir des personnes qui tiennent les rênes des théâtres, des maisons de quartier, des maisons de jeunes et de la culture, des foyers sociaux, des centres culturels, d'inviter Latifa Djerbi avec sa performance impromptue.
Pourquoi je dis ça ? Non pas parce que Latifa a de l'énergie et joue le jeu de la totale sincérité, mais parce que Latifa va évoquer, à partir de son cas personnel, le problème de millions de personnes en Europe avec une justesse qui équivaut à une tonne de bouquins de sociologie. Latifa va raconter sa double identité et montrer toute la richesse de ses différences, sans aucun didactisme. A la toute fin, elle nous avoue qu'elle ne trouve pas sa place dans notre société et qu'elle en est fière. Il est fort urgent que tous les élus politiques de tous bords assistent à ce spectacle, qui promet d'être drôle, léger, intense, profond, rempli d'autodérision. C'est du théâtre d'urgence, du théâtre nécessaire, du théâtre vital. »

- Photos -
Première Loge : © Dorothée Thébert Filliger, Billet Signé : droits réservés, Fait Maison : © Dorothée Thébert Filliger,
Hors Scène : droits réservés